mardi 23 mars 2010

Ni oui ni non… ni virgule?


Vous êtes-vous déjà questionné à savoir si vous deviez ou non mettre une virgule dans des phrases telles :

Je ne mangerai ni brocoli(,) ni chou-fleur(,) ni champignon.
Il n’apprendra pas ses leçons(,) ni ne fera ses devoirs.


La particule ni appelle-t-elle ou non l’usage de la virgule et si oui, dans quels contextes?


Site Grammaire aidenet

«La virgule sépare habituellement les éléments liés quand ils sont au nombre minimum de trois et que la conjonction ni est employée devant plusieurs éléments :

- Ni la chaleur, ni la pluie, ni le vent ne pouvaient les faire reculer.

La virgule n'est plus obligatoire (théoriquement) quand il y a seulement deux termes et que la négation ni est répétée devant chacun :

- Son vêtement n'était ni neuf ni usagé.»(1)


Site La-ponctuation.com

«Pour séparer des mots, des groupes de mots ou des propositions coordonnées par les conjonctions de coordination et, ou, ni lorsque celles-ci sont répétées plus de deux fois.

Il ne craint ni le vent, ni le froid, ni la neige.»(2)


Grevisse

«A. Dans une proposition, on met la virgule :
1º En général, pour séparer les éléments semblables (sujets, compléments, épithètes, attributs) non unis par et, ou, ni.

Remarque. – Quand les conjonctions et, ou, ni sont employées plus de deux fois dans une énumération, on sépare par une virgule les éléments coordonnés.»(3)


(1) http://www.aidenet.eu/h_ni.htm, section d (ponctuation)
(2) http://www.la-ponctuation.com/virgule.html, 2e flèche
(3) [GREVISSE, M. (1990). Précis de grammaire française, 29e édition. Éditions Ducolot, Paris, p.271-272.]

vendredi 19 mars 2010

Test surprise

___


En ce vendredi, voici un test surprise.

Il s’est glissé une erreur dans cette phrase. Trouvez-la.

Jeune homme, avez-vous jeté aux ordures le livre sur les participes passés que je vous ai données pour votre anniversaire?



Envoyez vos réponses à notre webmestre dans un pli cacheté. Prière d’inclure une enveloppe de retour si vous désirez une réponse. Délai d'attente de six à neuf semaines.


___

jeudi 18 mars 2010

Fixisme - l'explication Chevrel

Le cadre étroit dans lequel joue le système graphique de la langue ne permettait pas un nombre illimité d’améliorations. Le vice majeur de l’écriture française est qu’elle ne dispose pas d’assez de lettres pour représenter tous les phonèmes de la langue. Si l’alphabet français s’était prêté naturellement à une réorganisation orthographique d’inspiration spontanée ou populaire, il n’est pas douteux que notre orthographe elle-même n’eût continué à évoluer dans le sens de la simplification. Mais si l’on se refuse à mettre en cause l’économie générale et la référence à l’étymologie, si l’on renonce à la création arbitraire de lettres totalement nouvelles, il faut admettre que, au terme de la période considérée, la grande majorité des modifications structurelles possibles ont été réalisées.
(...) Le courant d’évolution orthographique (...) se tarit précisément parce que, dans le cadre traditionnel qui est resté le sien jusqu’au bout, il est d’une certaine façon arrivé alors presque au terme de sa course.
 
Chevrel, André, Histoire de l’enseignement du français du XVIIe au XXe siècle, 2006, éditions Retz, Paris, p. 129


* * *

Notre alphabet ne se prêterait pas à une «réorganisation orthographique d’inspiration spontanée et populaire», donc? Voilà une explication qui se fracasse sur l’impitoyable évidence de faits nouveaux. Les contextes social et technologiques ont changé. On n’a jamais tant écrit. Tout le monde. Et cette «réorganisation d’inspiration spontanée et populaire» se fait... sans nous.

lundi 15 mars 2010

Appel à la tradition


Débat sur l’orhographe: résumé des épisodes précédents

Ce billet s’inscrit dans un dossier sur les arguments classiques du débat sur l’orthographe ouvert l’automne dernier (le dossier, pas le débat). Dans le cadre de ce dossier, nous avons présenté avec plus ou moins d’humour, de mauvaise foi et d’ironie, en général plus que moins d’ailleurs (à tout le moins plus qu’aujourd’hui, si j’en crois le style quasi académique soporifique qui caractérise le début de mon intro, et dont la présente parenthèse, non contente de pasticher les procédés favoris de mon camarade Délèque, gâche l’harmonie) du côté réformiste: l’Argumentum ad populum, l’Argument démocratique, l’Argument fonctionnaliste et du côté puriste, ou conservateur, ou fixiste, ou antiréformiste l’Argument sémantique et l’Argument (généralement fallacieux) esthétique.

L’Appel à la tradition

L’argument implicite de base de la position antiréformiste est un appel à la tradition. Pourquoi changer ce qui est bel et bon, pourquoi vandaliser l’œuvre des anciens, cent fois reconduite par les produits de l’édition imprimée depuis deux cent ans? L’observateur profane voit en l’orthographe française un tout fini et monolithique, donné, en soi, par quelque divinité académique qui en aurait une fois pour toutes fixé les règles (et surtout les exceptions) sur une tablette de marbre originelle, quelque part entre la renaissance et la modernité. Étrange prémisse, en vérité, qui mériterait une longue méditation à elle seule (quelles qualités confèrent à une entité la sacralité requise pour prétendre au statut de monument de conservation? La perfection? Le prestige magique de l’idole?).

Orthographe mouvante

Il nous suffira de rappeler à ceux-là que l’orthographe que nous employons aujourd’hui n’est fixée que depuis 1835, et ce, au terme d’une série de modifications qui furent successivement entérinées par l’usage des imprimeurs, puis celui du public, dans le cadre d’une mouvance assez naturelle. Dans son excellente Histoire de l’enseignement du français du XVIIe au XXe siècle, Chevrel nous rappelle les faits:


(Tableau reproduit à partir de Chevrel, André, Histoire de l’enseignement du français du XVIIe au XXe siècle, 2006, éditions Retz, Paris, p. 118)

Que vaut l’immanence de l’i d’oignon sous un tel éclairage?

La tradition? Laquelle, donc?

jeudi 11 mars 2010

Émois coubertinesques en brèfle


Coucou, me revoilà, après une mise en web-jachère, ça fait un bail dites-donc, et autres plaisantes paroles d’usage pour se justifier qu’on avait aut’ chose à fiche que bloguer, à regrets, fidèles lecteurs, mais que là, ben youpi me revoilà, are-are.

Retour sur les olympiques, parce que nom de nom, il reste des choses à dire, linguistiquement, sur le sujet (autre que la quasi-absence de dignitaires quelconques, pendant les cérémonies, qui n’ont pas eu la décence de massacrer Molière en lisant un téléprompteur avec autant d’enthousiasme qu’un employé qui doit subir sa formation Vista trois jours avant sa retraite).

Mollo le trémolo, Garou

À Tout le monde en parle (Québec) à la télé, Garou parlait de son interprétation plutôt, euh, personnelle lors des cérémonies d’ouverture (j’ai pas vu, je dormais, et perso je m’en grattais l’os avec une indifférence qui frôle l’hystérie). Aux côtés de l’ex-Quasimodo, Pauline Marois, Chef(fe?) du Parti Québécois, qui prône l’indépendance du Québec (parfois), la défense de la langue françoise (virulemment) et autres trucs (le plus possible, allant de l’anodin au n’imp’).

Un mot au sujet de Miss Marois (tatie Pauline pour les intimes). Elle est cool, je trouve. Elle a un air un peu Castafiore, un peu bourge, mais elle est/veut être cool, parfois trop, genre comme ces quarantenaires qui disent « cool » pour en avoir l’air, alors que c’est juste navrant. Dans des contextes comme TLMEP, ce désir de « on est caupains, hein, hein? », ça se traduit en interventions fréquentes, en rires plus forts que ceux des autres, en clins-de-z’ieux charmeurs et en exclamations ponctuantes. Chaque possibilité qu’elle a d’intervenir, tel le gourmand pigeon au-dessus d’une pimpante mariée, elle s’empêche pas, tu vois?*. Fin de la parenthèse Marois.

Garou se consolait de sa, disons, prestation en se disant qu’il avait non seulement chanté en français, mais en plus, en québécois, devant près de trois milliards d’individus dotés de télévision. Que, mal chanté ou non, on a montré un bout de fleurdelisé au monde. Et c’est là que tante Pauline, énergique, télévisuelle, le félicite et amorce une salve d’applaudissements bien nourris.

En disant : YES!


Fail, Pauline. Mais on t’aime.

***

Joannie


Après les Jeux, Joannie Rochette subissait une conférence de presse. Fatiguée, éprouvée plus que de raison, on devinait que les questions, en anglais et en français (et même une fois en Boro, mais le mec fut expulsé), achevaient de puiser ses dernières énergies. Mais forte, généreuse, patiente, elle se prêtait à l’exercice, la môme.

Un mot au sujet (bis) des athlètes en conf’ de presse. Harrassés, ils finissent parfois par parler plus « perso », usant de tournures fautives. Mais on leur pardonne : sont fatigués, évoluent en bilingue dans le monde, ont fait des programmes sport-études, etc., bref, on a tendance à, condescendemment ou pas, leur pardonner des écarts, anglicismes et autres incartades. Re-fin de parentoche.

Le soir de sa prestation finale, j’ai pas pu dormir, et j’ai allumé le poste** pile pour voir la performance de Joannie. Émotion. L’était jolie, la pitchoune, mais avec cette force, elle commandait l’admiration. Puis, en conférence de presse, elle tint à peu près ce langage : « J’étais nerveuse, j’allais embarquer sur la glace, mes jambes shakaient ...». J’ai relevé l’anglicisme, mais elle parlait librement, émotivement, et puis, zut, c’est pas ça qui va égratigner mon admiration. Puis, épiphanie :...« euh, mes jambes tremblaient, excusez-moi...».


Win, Joannie. Et love.

_____________
*Oui, vous noterez, outre le retour de l’astérisque, que je lis du San Antonio ces temps-ci, et ce, dans le but de faire profiter nos lecteurs (accidentels ou non) du plus grand nombre de références littéraires possible. La semaine prochaine, je lirai, ne vous en déplaise, Blaise Pascal, Les pensées II : Les cheerleaders ingénues contre la créature zombie des marais.


**Nostalgie : on allume la téloche, l’écran plasma, youtube, à la rigueur, mais de poste, bernique. Pardonnez cet accès de vieillotisme.

mardi 9 mars 2010

Plaisantez-vous au deuxième ou au second degré?


Selon vous, existe-t-il une différence de sens entre deuxième et second? A-t-on là deux mots interchangeables, comme le sont vélo et bicyclette, qui se distinguent peut-être vaguement par leur contexte plus ou moins formel d’utilisation?

Petit Robert
«adj. et n.
1- Qui vient après une chose de même nature; qui suit le premier. → deuxième (on emploie plutôt second quand il n’y a que deux choses).»(1)

Larousse 2005
«adj.
1. Qui vient immédiatement après le premier.
2. Qui s’ajoute à qqch de nature identique.
3. Qui vient après le premier dans un ordre de valeur, de rang, etc.
– REM. On emploie second, plutôt que deuxième, quand il n’y a que deux éléments. »(2)

Eurêka! On ne peut donc employer second qu’en présence de deux éléments, pas un de plus ni de moins. La Seconde Guerre Mondiale, dans ce cas. La seconde moitié d’une tarte, encore.

Ainsi, une plaisanterie au second degré est moins recherchée qu’une au deuxième degré… laquelle laisse toute liberté à l’interlocuteur de trouver un troisième ou même un quatrième degré à ce mot d’esprit (mais il faut vraiment être trrrrès fort alors…!).

(1) [Le nouveau Petit Robert, édition 2004. Paris.]
(2) [Le Petit Larousse illustré, édition 2005. Paris.]

jeudi 4 mars 2010

Joutes verbales

___




Pour des insultes impliquant le manque de vocabulaire de son opposant, à l'issue de joutes verbales enflammées, des honneurs furent bafoués, des duels improvisés, des coups d'épée échangés.

Est-ce que la syntaxe, la typographie ou les verbes pronominaux ont, eux de même, quelque responsabilité, quelque mort d'homme au compteur?

La question est lancée, en pâture, au lectorat.



«Je n'en démordrai pas, triste sire...
Les verbes du second et troisième groupe peuvent garder
leur s à la deuxième personne du singulier de l’impératif... Aaarrgh...»

mardi 2 mars 2010

Les J.O. (ou comment supporter les supporters)


Avez-vous suivi les Jeux Olympiques qui viennent de se terminer? Moi oui, et j’ai mal supporté qu’on utilise le terme supporter à qui mieux mieux au lieu de partisan, au sens nominal, ou appuyer, soutenir, au sens verbal. Mais suis-je donc une puriste? Est-ce moi qui crie à l’anglicisme où il n’y en a pas?


PARTISANS de l’anglicisme

Petit Robert
«v.tr.
III. ANGLIC. SPORT Encourager, soutenir (un sportif, une équipe sportive). – PAR EXT. Donner son appui à.»(1)

«n.m.
ANGLIC. (var. francisée SUPPORTEUR, [RARE] TRICE). Partisan (d’un sportif, d’une équipe), qui manifeste son appui. – Personne qui apporte son appui à qqn.»(1)

Voici l’explication du Petit Robert pour le terme «ANGLIC.» :
«anglicisme : mot anglais, de quelque provenance qu’il soit, employé en français et critiqué comme emprunt abusif ou inutile (les mots anglais employés depuis longtemps et normalement en français ne sont pas précédés de cette marque).»(1)

Petit Larousse (2005)
«v.t.
6. SPORTS. (Emploi critiqué). Soutenir, encourager un concurrent, une équipe.»(2)

Grand dictionnaire terminologique
«Domaine(s) :
- appellation de personne
- sport

français : partisan, n.m.

Définition :
Personne qui manifeste son appui à une équipe sportive, à un concurrent.

Sous-entrée(s) :
forme(s) féminine(s)
partisane n. f.

terme(s) non retenu(s)
supporteur
supportrice
supporter
fan

Note(s) :
Même si les emprunts à l'anglais fan et supporter ainsi que les variantes francisées supporteur et supportrice, qui ont déjà fait l'objet de critiques, sont aujourd'hui couramment employés en français et sont d'ailleurs consignés dans les ouvrages de langue générale, ils n'ont pas été retenus puisqu'ils ne comblent aucune lacune terminologique. Ainsi, le terme partisan est à privilégier.
En France, la graphie francisée de l'emprunt supporter (supporteur) a été officialisée par la Commission générale de terminologie et de néologie, en 2000.
[Office québécois de la langue française, 2003]»(3)


SUPPORTERS du terme d’origine anglaise

Trésor de la langue française
«SUPPORTER2, verbe trans.
B. SPORTS, fam. [Le compl. d'obj. désigne un sportif, une équipe sportive, un club] Encourager, soutenir. Supporter un champion, une équipe de rugby. Beaucoup de Transalpins qui auront franchi la frontière pour supporter leurs compatriotes (coureurs italiens du Tour de France) (La Croix, 9 juill. 1965 ds GILB. 1971).»(4)

«SUPPORTER3, -TRICE, subst.
B. SPORTS. Amateur de sport qui manifeste son soutien à un sportif, une équipe, un club qui a sa préférence. Supporters d'un coureur cycliste, d'un footballeur. Quelques jolies femmes supportrices pour la plupart (Paris-Sport, 27 mai 1934 ds HÖFLER Anglic. 1982). Sans doute ne voulaient-ils pas tuer, ces supporters anglais qui se sont lancés à l'assaut d'une tribune italienne. Ils voulaient en découdre, bien sûr, sortir vainqueurs de cette conquête du terrain, mime grotesque de la conquête à venir du vrai terrain. Ils jouaient leur match (Le Monde aujourd'hui, 2-3 juin 1985, p. II, col. 6).»(4)

Petit Larousse (2005)
«n.m.
ou SUPPOTEUR, TRICE n. SPORTS. Personne qui soutient et encourage exclusivement un concurrent ou une équipe.»(2)


Conclusion
On constate que plus nombreux sont les ouvrages qui taxent d’«anglicisme» le terme supporter, lui préférant plutôt les termes partisan et appuyer, encourager ou soutenir. Par contre, le fait que le mot d’origine anglaise se retrouve dans les dictionnaires est en soi une reconnaissance de son usage au sein de la langue française. Et n’est-ce pas là le premier pas pour se frayer un chemin jusqu’à un usage accepté?

Une fois de plus, comme cela se se produit pour de nombreux anglicismes qui s’immiscent peu à peu dans notre belle langue française, il appartient au locuteur de se demander s’il préfère utiliser le mot français correspondant et existant, en exploitant la richesse de sa langue, ou s’il préfère «enrichir» une langue vivante d’un mot nouveau, emprunté à une langue voisine.

Le débat de principe demeure ouvert. Ce qui est intrigant, à mon sens, est de savoir pourquoi des mots issus d’autres langues en arrivent à remplacer des mots français (dans le cas qui nous occupe) pour décrire une même réalité. Ça demeure ma foi fascinant.


Références :
(1) [Le nouveau Petit Robert, édition 2004. Paris.]
(2) [Le Petit Larousse illustré, édition 2005. Paris.]
(3) http://www.granddictionnaire.com/btml/fra/r_motclef/index800_1.asp, sous l’entrée supporter (appelation de personne)
(4) http://atilf.atilf.fr/tlf.htm