"Actuellement, les ouvrages de référence entrent de plus en plus la nouvelle orthographe. C’est un mouvement irréversible qu’on ne peut pas ignorer. L’Italie, l’Espagne, l’Allemagne, le Portugal, la Grèce, etc., tous ont simplifié leur orthographe. Dans tous les cas, l’écriture a changé, mais sans la moindre conséquence pour la langue. Dès l’âge de huit ans, les petits Italiens connaissent tout de l’orthographe de leur langue. À l’heure d’Internet, le français doit lui aussi simplifier son orthographe. Il en va de sa survie."
- Aurel Ramat
L'argument est pratique et produit son effet.
Il s'agit, pour légitimer une attitude d'interventionnisme orthographique, de faire appel aux exemples des langues de culture (j'adore cette expression! Le petit côté impérialiste frissonnant de satisfaction! Essayons avec le grand 'C' : "langues de Culture"... Brrrr!) qui ont, au cours de leur histoire, procédé à des réformes radicales:
Ce faisant, le réformiste espère susciter un éclair lumineux chez l'interlocuteur:
"S'ils l'ont fait, ça prouve bien que les systèmes d'écriture de nature alphabétique (donc à l'origine, essentiellement phonétique, voir l'Argument ontologique) des langues de culture doivent nécessairement s'adapter, à la longue, à l'évolution de la langue orale, vivante!".
On (en tout cas je, sans jamais avoir déployé d'efforts notables pour étayer mon point de vue) cite souvent les cas de l'espagnol, du russe, du serbo-croate, du chinois (lequel, oui, je sais)... Et pour être convaincant, le réformiste qui s'aventure en ces eaux doit posséder une connaissance encyclopédique de l'histoire politico-linguistique des communautés sus-mentionnées, pour éventuellement faire la preuve que les réserves du clan adverse ne sont pas fondées en ces cas.
Que la littérature usant de graphies anciennes ne sera pas fichue au rencart.
Que les rééditions et resaisies feront rouler l'économie.
Qu'on ne laissera glisser dans l'oubli aucune icône du panthéon du passé.
Que l'éventuel sens porté par les graphies jetées sera aussi accessible par d'autres moyens.
Or, quelle que soit l'histoire de l'écriture espagnole, s'il se trouve qu'une réforme a dégraissé par exemple les graphèmes porteurs d'un sens morphologique ou étymologique d'une graphie ancienne, les arguments sémantique et culturel demeurent valables. Une trace perdue est une trace perdue.
En somme, invoqué légèrement, cet argument tourne parfois à l'Argumentum ad populum, dans un sens élargi.
Chantons la langue avec Michel Rivard
Il y a 19 heures
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